La Demeure Bardou (1886)

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Ce bel hôtel particulier, dessiné par l'architecte toulousain Frédéric Delor de Masbou, situé au n° 14 de l’avenue du Général de Gaulle, est construit par les frères Léon et Eugène Bardou.
Il est achevé en 1886, juste à côté de la fabrique du célèbre papier à cigarette Le Nil construite par leur père Joseph Bardou, en 1884 (immeuble juste à côté et bâtiment au fond de l'impasse).
Les locaux sont agrandis rue d’Alger en 1909. Un autre bâtiment sera construit en 1897 pour accueillir les accumulateurs électriques.

Demeure Bardou restaurée

La demeure Bardou est aujourd’hui découpée en 8 appartements. La dynastie du papier à cigarettes catalan, la firme Bardou est spécialisée dans la fabrication du papier à cigarettes. Ancêtre d’une véritable dynastie, son fondateur est Jean Bardou.
Cet ex-boulanger, originaire d’Ille-sur-Têt a l’idée d’ouvrir un atelier où sont découpées des feuilles de papier assemblées en cahier.
Son fils, Pierre, crée le célèbre papier "JB". La fabrique fondée en 1858 était située rue Émile Zola, en face de l'hôtel Pams.
Son autre fils, Joseph, se lance, lui aussi, dans la fabrication de papier à cigarettes dès 1849. D'abord rue Mailly, puis à partir de 1884, avenue de la Gare. Joseph Bardou décède en 1884 laissant à ses deux fils Eugène et Léon (1851-1899) la direction de l’entreprise familiale.
Pour information Eugène Bardou fut maire de Perpignan de 1894 à 1896 (conseiller municipal en 1888, adjoint au maire en 1892). Il meurt le 21 juin 1927. Comme il avait perdu ses deux fils au cours de la 1ière guerre mondiale, non seulement sa lignée prend fin avec lui, mais aussi la « Société anonyme des papiers à cigarettes Le Nil ». L'usine ferme ses portes cette même année 1927, laissant un grand vide dans le tout nouveau quartier de la Gare...


Un triste fait-divers : Le 4 avril 1899 aux alentours de 8 heures, un drame horrible trouble la quiétude du quartier de la Gare.
C’est le luxueux hôtel particulier où logent les frères Bardou qui en est le théâtre.
Ce matin là, des coups de feu attirent soudain l’attention des ouvriers de la fabrique. Devant l'hôtel particulier, les domestiques découvrent les corps ensanglantés de l’épouse d’Eugène Bardou et celui de son beau-frère, Léon Bardou... La première, la tempe perforée, le second, le crâne transpercé !
Léon Bardou vient de tirer sur sa belle-sœur Francine de retour de la messe, et a retourné son arme contre lui. Homicide et suicide sont alors attribués à l’état mental perturbé de Léon Bardou. (photo de Francine Bardou ci-dessus)

GLOIRE ET DÉBOIRES D’UNE START-UP

L’immeuble, de pierres et de briques situé au 14 avenue du Général de Gaulle, est plus élevé que ceux qui l’entourent et qui ont pourtant le même nombre d’étages. Il possède des garde-corps en fonte ornés de motifs plus riches que ses voisins, et sa façade est garnie de plus d’ornements sculptés, de corniches et de pilastres classiques. Dans l’axe du rez-de-chaussée, un cartouche entouré de feuillages sculptés est accompagné d’une inscription pour moi énigmatique : Papier GOUDRON de Norwège.

Quand on s’approche de la grille qui le jouxte, on s’aperçoit que cet immeuble n’est en fait que la face latérale d’un hôtel particulier dont la façade principale, encore plus richement composée, ouvre sur un petit jardin au fond duquel on aperçoit la silhouette monumentale d’une ancienne usine.

En cliquant sur Internet j’apprends que l’usine et l’hôtel particulier ont été édifiés à la fin du dix-neuvième siècle (1884 et 1888) par les frères Léon et Eugène Bardou qui vont fonder la marque de papier à cigarettes « le Nil ».
Une des start-ups de l’époque ! Le bâtiment monumental de l’ancienne usine à arcades couronnées de « bandes lombardes », a été conçue par Viggo Dorph Petersen.

Mais l’histoire se termine tragiquement.
En 1899 Léon tue d’un coup de pistolet la jolie femme d’Eugène et se donne la mort.
Les deux fils de celui-ci mourront pendant la Première Guerre mondiale, et après la mort d’Eugène, en 1927, son patrimoine immobilier sera transformé en logements par l’architecte Eugène Montès.

Quand on contourne l’îlot, on découvre une façade (réalisée en 1934) bizarrement plaquée sur les arcades de l’ancienne usine et entouré de constructions hétéroclites et qui vieillissent mal.

Merci à André Scobeltzine pour ses commentaires.

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